mercredi 29 avril 2009

mercredi 29 avril - du bon usage des conseils amicaux (2)

Vers 13 heures, comme d’habitude, un petit coup d’œil à la boite à lettres. Il y a quelques jours en effet, suivant une suggestion de Joël Louveau, j’avais reçu d’ « Accordinova » le disque « Flash Color » de Claude Thomain ; j’avais tellement apprécié ses compositions et le son de son accordéon, identifiable immédiatement, que j’avais commandé tout de suite à Claude Thomain lui-même ses deux autres cds, que je connaissais : « Accordéon Plus » et « Accordéon Orchestral ». Donc, quand j’ouvre la boite à lettres, le colis m’attend. Service rapide. On boit le café en écoutant « Accordéon Orchestral ». Après, des obligations nous contraignent à mettre une fin provisoire à ce plaisir. Ce n’est que partie remise. Je note que la prise de son est de Sergio Tomassi, que je connaissais pour avoir fait un travail extraordinaire comme accompagnateur de Serge Lama. Je note aussi que « Flash Color » est de 1972, « Accordéon Plus » de 1998 et « Accordéon Orchestral » de 2003. Outre la spécificité technique de cet accordéon, avec le son qui en découle, je suis d’emblée frappé par la dimension orchestrale et par le fait que je reçois chaque morceau comme une sorte d’histoire filmée sans paroles. Je suis très sensible en effet au fait que chaque morceau sonne comme un organisme, comme un système vivant et non seulement comme une juxtaposition d’instruments. Quelque chose de biologique par opposition à une somme mécanique. A approfondir, mais immédiatement perceptible. D’autre part, tout en écrivant ces premières impressions, comme j’écoute « Accordéon Plus », je me dis que Claude Thomain est aussi un poète de la nostalgie. Rien de triste, mais comme un léger décalage par rapport au présent qui passe. Comme un ancrage dans un temps improbable comme celui qui se définit par la formule magique : « Il était une fois… »




mardi 28 avril - du bon usage des conseils amicaux (1)

Pendant longtemps, je n’ai connu de l’accordéon que des échos de musette. Je l’associais donc à la baloche, au monde de la guinguette et à l’idée d’une musique d’abord festive. Une musique à danser plus qu’à écouter. Je l’associais à la recherche de la performance : plus de notes que moi, tu meurs ! Mais surtout j’avais l’impression d’entendre toujours les mêmes morceaux. Cette répétition, cette assurance d’avoir affaire à un monde connu, étant, me semble-t-il, une des raisons de son succès populaire. Bref, à l’écoute de cet accordéon, et en dépit de toute ma bonne volonté, je restais sur la touche. Jusqu’au jour où je me suis dit qu’il n’était pas possible que cet instrument ne soit capable que de produire une telle musique. Sympathique mais, à mes oreilles, dépourvue de créativité. Une musique au kilomètre. Une musique de vieux routiers, même si les musiciens étaient jeunes. Je me suis dit qu’il devait y avoir un autre accordéon, d’autres accordéons. C’est ainsi qu’une exploration assez superficielle a suffi pour me faire découvrir « New musette ». Avec cette mention en couverture : « Richard Galliano Quartet ». Comme si j’étais tombé sur mon intuition.
L’écoute de ce disque me donna l’envie de continuer mes recherches. C’est ainsi que je découvris, sur les rayons de la Fnac, de l’espace culturel Leclerc ou, plus tard, sur Alapage, des disques qui ont jalonné mon parcours d’initiation : « New York Tango », « Accordance » de Klucevsek et Bern (Leclerc avait reçu un lot de « Winter & Winter »), « Le tournis » de Lassagne, « Manouche Partie » de Jo Privat, « Les variations Goldberg » par Vaÿrynen, et bien d’autres encore, qui chaque fois m’ouvraient de nouvelles pistes.
Depuis, je n’ai eu de cesse d’explorer de nouveaux territoires, soit à l’aide de la revue « Accordéon & accordéonistes », soit en parcourant les sites d’accordéonistes sur internet, soit en visitant YouTube ou Myspace, soit de plus en plus en écoutant les suggestions et les conseils de correspondants amicaux, comme moi amateurs d’accordéon. Et je dois dire que cette voie, la relation amicale, est celle que je préfère. Comme par un effet boule de neige, elle fonctionne comme un réseau : pas de centre, mais une multitude de liens périphériques chaleureux. Un réseau d’échanges, informel et vivant. Une sorte d’arborescence ouverte et indéfinie.
Je dirai plus loin les satisfactions récentes que cette méthode, si je puis dire, cette démarche à la fois rigoureuse (chacun s’impose de faire part de ses passions aux autres) et aléatoire (c’est l’humeur qui sert de guide), m’a apportées. Mais je dois d’abord dire qu’il reste une limite à cette exploration : malgré tous mes efforts, le monde du musette me reste étranger. Malgré des essais et des efforts récents, rien à faire. Le musette m’ennuie. J’ai l’impression d’écouter toujours la même chose. Pire, j’ai souvent l’impression qu’il s’agit d’un monde de production industrielle, d’un monde de plagiats et de pastiches. Une bonne humeur de façade. Evidemment, je ne renonce pas. Encore récemment, et pourtant j’étais décidé à tous les efforts, échec. La pile de cds de musette monte donc petit à petit, fort lentement, mais, c’est un paradoxe, je ne peux me résoudre à les classer parmi mes disques d’accordéon.















Mais revenons plutôt à des découvertes récentes et heureuses.
Vendredi, 13 heures. Nous venons de charger la voiture. Direction Toulouse où nous devons aller chercher Charlotte et Camille à la sortie de l’école. Temps magnifique. Le jardin est en pleine forme. Lumineux. Une infinité de verts. Ombre et lumière. C’est l’image du feu d’artifice qui s’impose. On ne sait pas encore que le week-end sera pourri. Un temps de giboulées. Curieux temps où les froidures de l’hiver alternent avec des chaleurs d’été commençant. Contrastes. Sébastien, qui chaque jour parcourt ses cinquante kilomètres d’autoroute, aller et retour, n’en croyait pas ses yeux : le sol des champs saturés de pluie n’absorbe plus l’eau ; de vastes mares se forment, où des colonies de canards se sont installées. Bref, 13 heures. Au moment où nous allions nous mettre en route, le facteur arrive : deux colis. Je ne les attendais pas si tôt.
Dans l’un, trois cds envoyés par Jean-Marc L… que nous avions rencontré à l’espace Croix-Baragnon, à l’occasion des concerts du Renaud Garcia-Fons Quartet avec David Venitucci puis de Mélanie Brégant. Un envoi en toute simplicité et en toute amitié. « Vous connaissez Jean-Marc Marroni et Jean-Luc Manca ? ». « Pas du tout ! ». « Il faut que je vous les fasse connaître ». Voilà ! C’est fait. Comme l’écrit Jean-Marc : « La passion se partage, alors voici trois disques qui, je l’espère, vous plairont ». Entre parenthèses, preuve que ce monde de passion commune n’est pas un monde marchand, quand on partage des passions ou quand on les échange, on les multiplie.
- « Passé – Présent », Jean-Marc Marroni,
- « Œuvres de concert d’André Astier »
- « Bagatelles » de J.-M. Philips-Varjabédian, violon, J.-L. Manca, accordéon, R. Pidoux, contrebasse et Z. Stanojevic, violon.













Dans l’autre colis, tros cds du Quartet Maulus : un simple et un double. Il y a quelques semaines, un courriel de Patrick E… m’avait donné envie d’écouter ce quartet. Une suggestion, comme ça, en passant, mais une suggestion de Patrick avec qui j’ai maintes fois vérifié une grande communauté de goûts. Confiance donc. J’avais commandé « Evasion », un disque de 2001. Comme j’avais beaucoup aimé, j’avais, dans la foulée, commandé à « DLM Productions »,
- d’une part le double cd « Mon cœur » et « Monsieur FDG », 2006,
- d’autre part « Maulus en liberté », 2008.
Nous avons été tentés d’écouter quelques extraits de tout ce trésor en roulant sur l’autoroute, mais, non décidément, les conditions sont défavorables. Nous avons toujours la même réticence à écouter de la musique en voiture. Pour ma part, cette réticence est quasiment morale. J’éprouve comme un sentiment d’irrespect envers les artistes, un sentiment tel qu’à proprement parler il ne m’est pas possible d’écouter de l’accordéon dans de telles conditions. A fortiori s’il s’agit de disques que j’ai connus par ce truchement amical que j’évoquais plus haut.











A Toulouse, peu d’opportunités d’écouter confortablement nos disques. Dès notre retour à Pau, chauffent les galettes ! J.-M. Marroni et J.-L. Manca, c’est une vraie révélation. Un accordéon que nous ne connaissions pas. Sans aucun doute, avec l’aide de Jean-Marc comme guide, nous allons explorer ce territoire. Quant au quartet Maulus, c’est une autre forme de révélation : un accordéon qui nous est plus familier, mais surtout l’impression d’avoir affaire à une œuvre. On sent bien que c’est un projet fort qui fonde l’existence des opus de ce quartet. En première impression, je dirais que c’est une musique agréable, mais dire cela ne rendrait pas justice à la créativité qu’il manifeste. Et puis, en prime, on vérifie encore à quel point l’accordéon et l’harmonica sont frères.
A la limite, comme on dit, presque trop de découvertes et de plaisir. Mais qui s’en plaindrait ?









mercredi 22 avril 2009

jeudi 23 avril - sébastien farge

J'avais écouté Sébastien Farge, il y a un peu plus d'un an, dans l'émission "Accordéons sans frontières". Et puis, plus tard, j'avais lu une chronique fort élogieuse à son sujet dans "Accordéon & accordéonistes". J'avais pris contact avec lui pour lui demander s'il était possible de lui commander un disque directement. Il y a peu, il m'a proposé par courriel de m'envoyer l'un de ses disques et m'a fait part d'un autre disque, plutôt "jazzy", me demandant si j'étais intéressé. Affirmatif. Mardi matin donc, à 10h30 précises, la dame de la Poste a sonné à la porte. "Un colis pour vous. Une petite signature ici". Je lui ai proposé un café sortant du percolateur. Elle m'a dit : "Non, merci ; avec les trépidations de la voiture, ça me donne envie de pisser". Je n'ai pas insisté. Je l'ai raccompagnée jusqu'au portail. Un temps maussade. il ne pleut pas, mais c'est pire : l'air est chargé de gouttelettes, saturé devrais-je dire. On fais trois pas dehors et l'on se retrouve mouillé de la tête aux pieds. Le jardin est comme ankylosé. Sombre, secret.















Une tache de couleurs : le mini jardin de curé de Françoise.


Rituel : je me donne quelques secondes pour contempler le colis et imaginer un peu son contenu.
Deux cds : "Sébastien Farge avec l'ensemble orchestral de Patrice Peyrieras" et "Sébastien Farge, / Délit musette, entre accordéon et chansons". Le premier enregistré à Tulle en 2003 ; le second en 2008. La liste des sponsors du premier est impressionnante : Tulle, la Corrèze, Le Limousin, l'APPNAT, la Sacem, SPEDIDAM, le Ministère de la Culture et de la Communication, Hyundai, France Bleu Limousin, Accordéons Maugein, Leader+. Celle du second ne l'est pas moins.

Je parcours en diagonale la liste des titres : "Paris - Buenos Aires", "Voyage", "Florilège Swing Musette, sur les motifs de Gambillette, Délit Musette, Swing for You, Taquinerie" et, in fine, "Bruyères Corréziennes" (arrangement original sur la composition de J. Ségurel. Quelques titres de "Délit Musette" : " Accordéon mon copain", "Pedro de Cuba", "On glane en Corrèze", "J'ai le coeur brésilien", etc...
Des vastes espaces de la Corrèze et des personnages sortis d'un tableau de Millet aux moiteurs de Cuba en passant par des rythmes venus directement de l'immensité du Brésil ou par les tentations amoureuses d'une nuit parisienne ("Je me blottis contre toi")... Avec l'orchestre de Patrice Peyrieras, le grand orchestre, et pas moins de quatre chanteurs.




mardi 21 avril 2009

mercredi 22 avril - spécial copinage : nouvelles de l'ons

... reçu ce courriel de Bruno Bonté : l'Orchestre National de Salilhes est toujours bourré... d'énergie ! Qu'on se le dise !

Il s'agit juste de dire que l'Orchestre National de Salilhes joue à Murat le samedi prochain 25 avril 2009 à 21h00 à la Salle Léon Boyer.

ONS :
http://myspace.com/orchestrenationaldesalilhes

Il s'agit d'un concert-bal organisé par les gens de Murat pour tous ceux qui ont envie de s'offrir le plaisir d'écouter notre musique et de la danser, de voir ou/et revoir l'ONS et ses musiciens, bourrés d'énergie, déchaînés, comme d'habitude.

MERCI DE FAIRE CIRCULER L'INFORMATION AUTOUR DE VOUS !

A bientôt : Bruno Bonté.

dimanche 19 avril 2009

mardi 21 avril - en vrac...

Dimanche. Une journée de farniente. Le soleil imperturbable n'a pas cessé de tracer dans le ciel sa route sans nuages. A peine une petite boule de coton commençait-elle à se former, tout là haut, qu'elle était illico néantisée. Un temps idéal pour tondre la pelouse. Oui, mais la météo avait annoncé des risques d'orages sur la chaîne des Pyrénées. D'habitude, la météo ne détermine pas ma conduite. Mais aujourd'hui, prétexte, excuse, ou je-ne-sais quoi, en tout cas bonne raison pour ne pas déranger la tondeuse. Du coup, malgré ma mauvaise conscience, j'ai écouté de manière quelque peu aléatoire en surfant sur la vague de l'humeur trois disques récemment découverts.

- "Evasion" du Quartet Maulus. On y croise "A Bicyclette", musique de Francis Lai et Pierre Barouh. Ah! Bon ! "Caravan" de Duke Ellington et Juan Tizol. "Swing 39" de Django Reinhardt et Stéphane Grappelli. Un choix de compositions d'Aznavour. Mais aussi Gerschwin ou Emile Carrara : "Mon Amant..." ou Gainsbourg. Un éclectisme étayé par une solide maitrise. Agréable et même un peu mieux que ça...

- "Somi de Granadas / Le champ des dunes". Je cite cet extrait du texte de présentation : "Darius Milhaud affirmait que la musique des pays d'oc s'étendait de Jérusalem à Rio de Janeiro. Le groupe Somi de Granadas créé par Guillaume Lopez et Thierry Roques s'insère dans cet espace musical qui va des Balkans au Rio de la Plata via l'Andalousie". Un disque attachant. La voix de G. Lopez est émouvante. L'alternance entre accordéon chromatique, bandonéon et accordina est toujours pertinente et chargée de sens.

- "Flash Color" de Claude Thomain. Un disque du catalogue Accordinova de Joël Louveau. Je n'ai pas su trouver la date de parution. Je continue à chercher. A mon sens, ce disque n'est pas né d'hier. Plutôt qu'un long commentaire, je m'en tiens à deux indications. Au dos, on peut lire :"Claude Thomain et son orchestre". Claude Thomain, accordéon électronique, "Major Vox". Son orchestre ? Quatre trombones, dont un basse ; une batterie (A. Ceccarelli) ; une guitare ; une contrebasse ou guitare basse ; deux percussionnistes (jouent-ils ensemble ou en alternance ? L'enquête continue. Un son de big band. Quelque chose de difficile à définir. Etrange et fascinant. Quelque chose d'unique, une sorte de météore sans postérité, si j'ose dire.

lundi 20 avril - spécial copinage : des nouvelles de jacques pellarin

J'ai plaisir à signaler ici la mise en forme par Jacques Pellarin de son site. Il vaut vraiment une visite. Lisible, complet, très professionnel... Bref, inutile d'en dire toutes les indéniables qualités. Une visite suffit. Elles sautent aux yeux.

http://www.jacquespellarin.fr/

Mais encore, on retrouve Jacques Pellarin sur myspace. Autre visite qui vaut la peine.

http://www.myspace.com/jacquespellarin

Bonne visite !

samedi 18 avril 2009

dimanche 19 avril - mélanie brégant et florent charpentier : neuf photonotes

Du concert donné par Mélanie Brégant et Florent Charpentier, le mardi 14 avril, à l'espace Croix-Baragnon, je retiens ces neuf photonotes : deux du duo, sept de Mélanie elle-même. Elles me paraissent assez significatives de leur posture. Acoustique pur. Economie des gestes : rien de trop. Une musique écrite : respect scrupuleux des partitions. Souci constant de la juste interprétation. Je note la présence des pupitres : entre les auditeurs et les interprètes, le pupitre comme manifestation visible d'une médiation, d'un intermédiaire. Les regards en disent long. Bien plus qu'un commentaire ou qu'une glose discursive. Intensité !

18h39. premières images du duo.

19h16. Florent a pris sa clarinette basse pour quelques morceaux.

18h36.

18h37.


18h41.


18h46.
18h51.
19h00.
19h07.
Le pupitre chargé de partitions : un rempart, une protection, un défi, un tourment, une hantise, un interlocuteur ?








dimanche 19 avril - 48 heures et quelques plombes...

Samedi, 10 heures. Pas un souffle de vent. Le ciel transparent, à peine bleuté. Les sommets éclatants : la neige, tombée en abondance durant tout l’hiver et encore récemment, découpe la ligne des sommets comme un scalpel. De Pau, on sent que la montagne sombre est couverte de poudreuse. On sent un certain froid venu du Sud. A Pau et dans la plaine qui mène jusqu’aux vallées étroites et profondes, du vert, du vert partout. La pluie a à peine le temps d’arriver au sol ; elle est absorbée par les feuilles gloutonnes. L’herbe pousse à vue d’œil. Françoise, tout en montant l’escalier, se fait cette réflexion à haute voix : « C’est super, on n’a pas Leclerc ». Je décrypte : comme nous avons fait les courses alimentaires hier soir à l’hypermarché, aujourd’hui, c’est comme des vacances ; on est en congé de corvée. J’en profite pour reprendre mes notes…

- mardi, 10 heures. Je viens de faire les deux valises de mon père. Il sort de l’hôpital. Il y était entré très dépressif. Il va mieux. En quelques semaines, sa nuque c’est pour ainsi dire brisée : il a les plus grandes difficultés à redresser sa tête, mais il a cessé de se plaindre continûment de douleurs baladeuses. Il marche lentement, mais il ne souffre plus de pertes d’équilibre.
- 10h30. Quelques formalités administratives. Je l’installe dans sa chambre : maison de retraite Saint Joseph à Nay. Je lui montre où j’ai disposé ses vêtements, son linge, ses affaires. Il est ailleurs. Il n’est ici qu’à partir du moment où l’infirmière qui l’a accueilli lui montre la télécommande de la télévision. Il s’installe dans son fauteuil et commence à jouer : la nounou télévision commence son office.
- 12h15. J’ai accompagné mon père au restaurant de la maison de retraite. Durant son séjour à l’hôpital, son appareil dentaire s’est cassé. J’ai demandé un repas « haché ». On me propose de manger avec les résidents. Le moral n’y est pas. Je vais manger un couscous au « Maghreb ». Le mardi, c’est jour de marché à Nay. Un marché à l’ancienne : les gens discutent par petits groupes ou marchandent des vêtements. Tranquilles. Les voitures attendent. Les conducteurs baissent les vitres et se joignent aux conversations.
- 13h00-13h45. Retour à Saint Joseph. J’accompagne mon père jusqu’à la chambre de ma mère. Je les laisse seuls un moment. Ils semblent sidérés de se retrouver. Silencieux. Je m’occupe de ma mère : ranger son armoire, nettoyer son appareil dentaire, la coiffer, mettre un peu d’ordre dans les affaires de son cabinet de toilette, etc… Et surtout, disposer avec soin six mouchoirs pliés en quatre dans son sac à main. Sans oublier d’enlever toutes les traces de doigts sur ses deux petits miroirs, l’un rond, l’autre rectangulaire. Je ramène mon père à sa chambre. Il allume la télévision. Je pars perplexe.
- 14h00. Je vide la boite à lettres de la villa de mes parents à Baliros. Fermée depuis quelques jours, elle est déjà froide et résonne comme un lieu vide et sans vie. Durant le trajet de Nay à Baliros, une dizaine de kilomètres, une suite de villages béarnais, austères et imposants, je suis frappé par la présence de glycines énormes, aux troncs torsadés comme des câbles de navires, qui tombent en lourdes grappes le long des murs en gros cailloux. Parfois, la force de ces troncs est telle qu’elle a fait exploser le mur ou qu’elle est en train de broyer le portail d’une ferme abandonnée. De loin en loin, la masse sombre d’un camélia : vert profond, presque noir, des feuilles ; feu d’artifice des fleurs qui semblent venir d’une source inépuisable. Les camélias, quelle générosité ! A leurs pieds, le sol incandescent.

- 14h45. Françoise a préparé les valises et fermé la maison. Départ de Pau pour Toulouse. Un concert nous attend en fin d’après-midi.
- 16h45. Arrivée à Toulouse. Les petits sont allés faire de l’escalade. La maison est vide. Nous sommes encore sous l’impression du parcours : une autoroute facile et peu fréquentée. Pendant la plus grande partie du trajet, à notre droite, les Pyrénées, magnifiques. Une masse sombre, presque sauvage et impénétrable ; une ligne de sommets tellement blanche que le regard ne peut longtemps en soutenir l’éclat. Le blanc comme limite de ce que l’œil peut supporter comme sensation.
- 17h20. Après un rapide goûter : thé et biscuits, nous rejoignons le métro à la Roseraie. Nous descendons à Esquirol, quatre ou cinq stations plus loin.
- 17h35. Un café de Colombie - il est raide ! – sur le zinc, dans un bar à café, à deux pas de l’espace Croix-Baragnon.
- 17h45. Nous nous installons devant la salle bleue. Peu après, arrive un passionné d’accordéon (mais lui en joue aussi), que nous avions rencontré au concert du Renaud Garcia-Fons Quartet il y a quelques jours. Il s’amuse de nous voir déjà installés. Nous reprenons le fil de nos échanges entamé lors de ce concert. Echanges pleins de sympathie immédiate. Echanges au cours desquels nous découvrons que nous étions présents aux mêmes concerts et que nos goûts coïncident.
- 18h30-20h00. Concert de Mélanie Brégant, accordéon, et Florent Charpentier, clarinette. Concert de 18h30 à 19h30, puis deux rappels : une composition de style klezmer et l’Ave Maria de Piazzolla. Un programme sinon difficile, du moins rigoureux. Deux interprètes dont on sent d’évidence l’exigence sans concessions. Au fur et à mesure des morceaux, ils nous introduisent dans leur monde. La clarinette est si je puis dire sur le devant de la scène, l’accordéon est présent avec une délicatesse extrême. A la fin du concert, nous sommes d’accord, Françoise, moi-même et notre ami passionné, dont j’ignore encore le nom, pour dire que le concert nous a semblé démarrer par des pièces difficiles pour aller de plus en plus vers des pièces plus accessibles. Et l’on se dit que ce sentiment est peut-être bien dû à la qualité des deux concertistes, qui ont fait là œuvre d’initiation. Je suis touché par leur jeunesse au moment des rappels. Je perçois dans leur posture une modestie et une détermination qui rehaussent leurs qualités artistiques. Une exigence éthique au service de l’esthétique.
- 20h00-20h10. Nous restons quelques minutes devant la porte de l’espace Croix-Baragnon. Le temps d’échanger encore quelques impressions et nos adresses avec Jean-Marc L…. Le temps pour lui de nous parler de deux accordéonistes dont nous ignorions le nom : J.-M. Maroni et J.-L. Manca. Il se propose de nous les faire écouter. Le temps enfin de nous donner rendez-vous à Trentels, en mai.
- Soirée avec « les petits ». Charlotte et Camille nous racontent tout ce qu’elles ont appris dans la journée au sujet des hommes préhistoriques. Le feu, les armes, les peintures rupestres, etc… et puis, elles tombent de sommeil. Demain, ils partent en Espagne rejoindre des amis. Demain, nous rentrons à Pau.















- mercredi, 13h00. Comme une petite faim. Nous quittons l’autoroute à Saint-Gaudens. Nous déjeunons sur une terrasse ensoleillée, près du cloitre. Après le repas, nous faisons le tour du cloitre. C’est une forme d’architecture qui me fascine. Les figures humaines de la sculpture romane, que l’on y rencontre, sont parmi celles qui me touchent le plus. Je suis capable de rester de longues minutes à rêver et même à méditer devant ces représentations. Je me sens très proche de la nostalgie, de la tristesse, de la sérénité, du stoïcisme, de la mélancolie qu’elles expriment. Je suis fasciné aussi par l’architecture même des cloitres romans en y pénétrant et en découvrant les jeux d’ombre et de lumière qui les animent. D’une certaine façon, on pourrait dire que l’architecture, l’agencement des pierres, l’organisation de l’espace, donnent vie à la lumière du jour. En rejoignant la voiture, nous remarquons une affiche qui annonce un concert de Paolo Fresu, plus exactement du Paolo Fresu Devil Quartet.
- 16h00. Retour à Pau. Le temps d’ouvrir la villa. Les réfrigérateurs sonnent le vide. Il faut aller faire quelques courses alimentaires. Les sacs entassés dans la voiture, petit détour par l’espace culturel. On tombe sur le disque de Fresu. Françoise ne résiste pas. De mon côté, je tombe sur un disque, « Somi de Granadas ». Thierry Roques, accordéon chromatique, bandonéon, accordina et Guillaume Lopez, chant, flûtes, cornemuses. Evidemment, dès notre retour, tournent les galettes. Le repas du soir est accompagné, en alternance, par des morceaux de l’un et l’autre disque. Et ça nous fait plaisir.



































- jeudi, 12h00. Un colis « Accordinova ». A l’intérieur, d’une part un cd, « Flash Color », de Claude Thomain, que Joël Louveau m’avait conseillé et dont Bruno Maurice m’avait parlé, d’autre part un cd, «Evasion », du Quartet Maulus, dont Patrick E… m’avait parlé dans un courriel arrivé au moment même où je passais commande de « Flash Color ». Du coup, l’envie m’était venue d’y ajouter ce cd du catalogue « Accordinova ». Le disque de Claude Thomain est surprenant. Nous pensons à un orchestre de Michel Legrand. Nous pensons à un big band. Le disque des frères Maulus est plein de charme. Accordéons (et accordina), batterie, contrebasse. Par exemple, « A bicyclette » ou « Chez Laurette » (6 :41).
- 14h00-16h00. Nay. Maison de retraite Saint Joseph. Mon père a une chambre au premier étage. Ma mère au rez-de-chaussée. Mon père s’installe, prend ses marques, essaie de mémoriser le parcours de sa chambre au restaurant, de sa chambre au foyer, de sa chambre à celle de ma mère. Ma mère a ses habitudes. Elle attend mon appel téléphonique chaque jour entre 14h00 et 14h05 : avant, je la dérangerais, après elle serait folle d’inquiétude. Je m’occupe de l’un et de l’autre, en essayant de faire des parts égales, pour éviter de réveiller jalousie et rivalités entre eux. Je n’arrive pas à identifier les sentiments que suscitent chez eux cette étrange cohabitation. Souvent, je pense : « Sado et Maso sont dans un bateau, Sado tombe à l’eau…». Oui, mais, qui est Sado, qui est Maso ? Chacun des deux sans doute au gré des permutations de rôles.
- Fin d’après-midi : appel téléphonique de Sébastien Farge. Je lui avais envoyé un courriel en janvier 2008 (sic !) pour lui dire mon intérêt pour l’un de ses disques entendu à l’émission à laquelle collabore Sylvie Jamet, « Accordéons sans frontières ». Il me répond donc aujourd’hui : il se propose de m’envoyer son cd et, si je le souhaite, un autre, de style « jazzy », dont j’ai lu une chronique très favorable dans « Accordéon & accordéonistes ». C’est parti !
- 23h00. Après avoir écouté encore et encore « Evasion » du Quartet Maulus, je fais un tour sur le site. J’imprime et je remplis le bon de commande : « Maulus en liberté» (15 euros), « Mon cœur, Monsieur FDG, un double (20 euros)». Chèque bancaire : 15 + 20 + 4 de frais de port : 39 euros. Le courrier partira demain matin.

Dès que possible, je reviendrai sur le concert de Mélanie Brégant et Florent Charpentier pour le double plaisir d’en tirer des photonotes et de me remémorer des instants heureux.


























dimanche 12 avril 2009

lundi 13 avril - de part et d'autre

Ces huit photographies ont été prises entre 14h18 et 14h48. Le lieu : un hall au carrefour de plusieurs couloirs menant à des salles de cours. Plus précisément, Bruno s'est installé devant la porte de la salle d'orgue, d'où sortiront bientôt des élèves en grand nombre, qui s'installeront, assis en tailleur, pour écouter, durant environ huit minutes, "De part et d'autre", avant d'applaudir longuement et de se disperser vers quelque autre "impromptu".

Je dois dire que ces photographies, sans prétention artistique, me touchent par leur charge affective. Elles s'articulent de la manière suivante :

- photo n° 1. Bruno répète.
- photos n° 2 - 4. Il joue pour son plaisir et du coup pour le nôtre aussi un morceau d'un compositeur américain, dont le nom m'échappe, qui manifestement le remplit de joie. C'est sa manière, me semble-t-il, de neutraliser le stress de sa prestation imminente.
- photo n° 5. Il tient son rôle de pédagogue authentique avant d'entamer son interprétation.
- photos n° 6 - 8. La tension de l'interprète.

1. Il s'agit de prendre ses marques. Choisir la bonne chaise, la bonne place, la bonne posture. toutes choses que l'on aurait tort de considérer comme matérielles. Mettez-vous à genoux et bientôt vous croirez, disait à peu près Pascal. Trouvez la bonne posture, celle qui vous convient, et bientôt l'interprétation viendra comme coulant de source. Mais justement ces ajustements sont difficiles. L'oeuvre est complexe. Bruno nous explique à quoi tient cette complexité et, ce faisant, nous explique le sens du titre qui fait allusion à des jeux de relations entre les deux claviers.

2-4. Tout en développant ses explications sur la composition, Bruno se lance dans l'interprétation d'une pièce d'un compositeur américain. Moment rare, de pur plaisir. Je tiens pour un vrai privilège d'assister à un tel moment. C'est pourquoi j'ai eu à coeur d'en reparler avec les filles, pour qu'elles prennent conscience de la valeur d'une telle situation où l'on a la chance de saisir, dans l'instant, quelque chose de la création artistique. Tout me porte à croire qu'elles n'oublieront pas ce moment de sitôt.



J'aime beaucoup cette image. Sourire, détente. "Carpe diem".


5. Le jeune public s'est assis en hémicycle. Attentif. Alors Bruno se lève et contextualise l'oeuvre qu'il va jouer pour la deuxième fois en public. Il en explique la genèse ; il donne quelques commentaires sur son instrument, sa technique, ses spécificités ; il situe le compositeur ; il explicite le titre.




6-8. Ces trois portraits me touchent particulièrement. Ils disent en effet la tension de Bruno. Il faut les comparer aux photographies 2 à 4 pour saisir l'intensité de cette tension. On comprend, me semble-t-il, quelle énergie est ici consommée. On pourrait dire à juste titre : "La fatigue se lit sur son visage".




Un dernier mot sur ma perception de cette pièce. Je m'attendais à une oeuvre difficile et en effet j'ai eu le sentiment qu'il s'agissait d'une construction complexe, du produit d'une pensée combinatoire et presque d'ingénieur, au sens où sa complexité est élaborée dans le moindre détail. Si j'osais, je parlerais d'ingénierie musicale, tirant parti au maximum des ressources de l'instrument et de la virtuosité de l'interprète. Mais en même temps rien de trop conceptuel. D'un bout à l'autre du morceau, j'ai été sensible à une atmosphère étrange, quelque chose comme la description d'un monde de variations et de déplacements. A la fin, j'ai eu du mal à émerger. J'étais ailleurs. Et bien entendu il me tarde déjà de pouvoir réécouter "De part et d'autre".






lundi 13 avril - le migrant à l'accordéon

Mercredi 8 avril. 11 heures 20. Charlotte et Camille tournent dans leur nacelle, qui tourne dans le manège de chevaux de bois installé sur les allées de Tourny. Au bout du cinquième tour, elles descendront, l'estomac un peu chamboulé. Le sol des allées leur semble instable. Les arbres ne sont pas tout à fait verticaux. Ils hésitent à pencher tantôt à droite, tantôt à gauche. Au-delà du manège, à droite, on aperçoit la colonnade du Grand-Théâtre. Un son familier, d'abord incertain, puis de plus en plus identifiable, nous parvient. Il s'agit bien d'un accordéon.


Attiré par la musique, une sorte de musette des Balkans ou d'accordéon des Balkans façon musette, je vois l'accordéoniste, devant l'entrée du Grand-Théâtre. Il se confond avec la pierre du bâtiment. Il est pour ainsi dire transparent. Les gens qui passent n'ont pas un regard vers lui. L'entendent-ils seulement ?

Au fur et à mesure de mon approche, son image se précise. Son Balkan-musette aussi.

Je dépose quelques euros dans la boite posée à ses pieds et je lui demande la permission de le photographier tout en manifestant mon intérêt pour sa musique. Il a cet air étrange des gens venus d'ailleurs, de quelque part, et qui vont autre part. Comment le désigner ? Immigrant, immigré, émigrant, émigré ? Aucune de ces dénominations n'est indifférente, ni neutre. Chacune est lourde d'une signification idéologique. Pour ma part, je dirais volontiers qu'il s'agissait d'un migrant, quelqu'un qui fait partie d'un vaste peuple qui se déplace. Un peuple, plus exactement une population, des individus, à peine des personnes, sans lieu : des gens dont l'identité, sinon la nature, est de se déplacer.
Que ce soit à Paris, à Toulouse ou à Bordeaux, je suis frappé par ces gens venus des Balkans ou peut-être de Turquie ou du Kurdistan ou de l'Ukraine ou d'ailleurs, qui surgissent aux carrefours pour laver les vitres des voitures, qui mendient devant les boulangeries ou aux portes des agences postales, qui jouent de l'accordéon ou du violon aux carrefours ou aux entrées du métro. Après avoir pris quelques images, je me rends compte que je rêve. Il est temps d'aller retrouver Charlotte et Camille sur leur manège. Il est temps de songer à aller manger avant de rejoindre le conservatoire et Bruno Maurice.