mercredi 31 mars 2010

jeudi 1er avril - somi de granadas au conservatoire occitan : trois photonotes

Ils sont là tous les trois. Lopez à la cornemuse ; Dayraud à la batterie ; roques à l'accordéon. L'espace est réduit, mais l'imagination a pris le pouvoir. On parcourt un espace qui va de l'occitanie au maghreb, de la catalogne à l'andalousie comme dans un rêve. Des mélodies et des mélopées venues du fond des âges, comme cette bourrée soeur de la terrible tarentelle. Une musique faussement tranquille. L'inconscient est là, prêt à surgir, au détour d'une chanson qui se cache sous le masque de l'innocence.

J'aime bien cette image parce qu'elle est décentrée et que l'on voit bien les deux claviers de l'accordéon. Je la garde pour son double intérêt, formel et descriptif.

Celle-ci aussi, je l'aime bien. Jouer de l'accordéon, ce n'est pas une affaire de tout repos. Parfois, Thierry Roques, comme l'eau dormante, peut se transformer en cours d'eau violent, dévastateur, brutal. Bien sûr, ça ne dure pas, mais on a vu de quoi il est capable.




jeudi 1er avril - barboza au bijou le 26 mars : trois photonotes

Embarquement. On a changé de place. Les micros ne nous masquent plus le visage de Barboza. Son calme au milieu des tempêtes qu'il déchaine est impressionnant. Son énergie traverse son accordéon et l'on se demande comment le soufflet n'explose pas.

Cette image symbolise assez bien pour moi l'allure du duo : Nardo à gauche, attentif et obstiné - ostinato rigore - ; Barboza à droite avec son accordéon trituré, torturé, caressé et beau comme un camion.

"Adios Nonino". Comme une méditation. Le concert et la tournée sont finis. Charlotte est sous le charme et l'on se dit que ce sont des moments et des émotions qu'elle n'oubliera pas de sitôt. On est heureux. Forcément !




jeudi 1er avril - barboza au bijou le 25 mars : trois photonotes

Il m'est bien difficile de faire un choix parmi les photographies que j'ai prises au cours des deux concerts de Barboza au Bijou et de Somi de Granadas au conservatoire occitan. Mais justement, c'est pourquoi je me suis imposé de n'en garder que trois par concert, choix drastique, trois photonotes pour essayer de garder traces d'émotions particulières et de moments rares.

Le concert vient de débuter. C'est le premier morceau. Le voyage commence. Une posture qui d'emblée impose le respect. Puissance et douceur ; fulgurances et fragilité.

Entre deux morceaux, un instant de pause pour prendre le temps de l'explication. La parole ne peut exprimer l'essentiel, mais elle peut expliciter les circonstances de telle ou telle composition, elle peut préparer l'écoute en esquissant des pistes d'interprétation. Elle permet aussi de philosopher un peu.

Le voyage prend fin. L'image ressemble à la première. Je pense que Barboza a une formidable présence ; je pense aux statues monumentales de l'île de Paques ou à quelque masque inca.




mercredi 31 mars - 1, 2, 3... concerts

Mercredi 24. Je suis allé rendre visite à mes parents à la maison de retraite Saint Joseph, à Nay. Il est 16h30, je suis sur le chemin du retour vers Pau.
A 19h30, nous arrivons à Toulouse, chez "les petits". Nous avons deux projets : jouer "Papou/Mamou" auprès de Charlotte et de Camille et aller écouter trois concerts : Raul Barboza au Bijou, jeudi et vendredi ; Somi de Granadas au Centre occitan des musiques et danses traditionnelles, samedi.

Jeudi 25, 21h30, concert de Raul Barboza et Nardo Gonzales, à la guitare, au Bijou, avenue de Muret, près du rond-point de la patte d'oie. Fidèle à notre habitude, pour ne pas dire à notre stratégie, nous arrivons au Bijou à 20h45. C'est un bistrot chaleureux, plein de bruits de conversations. Une salle tout en longueur avec des tables et des banquettes de deux à trois personnes en face à face sur la gauche et le comptoir à droite. Au fond, l'espace s'élargit, quelques tables carrées et des chaises, puis un guichet et une porte vitrée ouvrant sur une arrière salle d'une capacité de 150 à 200 personnes. Pour l'instant, la porte est fermée. Nous attendons. A 21 heures, la porte s'ouvre. Les chaises sagement alignées face à la scène surélevée de quelques centimètres sont spartiates. La guitare de Nardo Gonzales est à gauche ; l'accordéon de Raul Barboza, à droite. L'organisateur présente le duo en quelques mots ; il demande que l'on éteigne les téléphones mobiles et que l'on ne prenne pas de photos. J'ai coupé le flash et le son du déclencheur de mon Samsung, que je pose discrètement sur mes genoux. Je vise au jugé. Finalement, je "vole" une quarantaine de clichés.

22:28. Dès le premier morceau, on retrouve Barboza tel qu'en lui-même. Pour caractériser son style, une expression me vient à l'esprit :"paroxysmes contrôlés". Il me semble en effet reconnaitre dans chacune de ses interprétations une sorte de structure générique. La mélodie mise en place, c'est comme si une sorte de transe s'emparait de ses doigts et du soufflet de son accordéon. Mais cette pulsation reste toujours contrôlée.

22:39. J'ai beaucoup d'estime pour Barboza en tant que personne. D'ailleurs, comment distinguer la personne et le musicien. C'est un type bien. J'aime la manière dont il situe chaque morceau, en particulier les conditions de chaque composition. On le sent chaleureux, attentif aux gens et à la nature. On sent bien l'étroite complicité qui les unit, son collègue guitariste et lui-même. Il est ému en parlant de son dernier album "Invierno en Paris", dont il reprend plusieurs titres, et surtout en annonçant que ce concert est l'avant-dernier de leur tournée.

23:22. Après le concert, nous avons aperçu Florian Demonsan, sans pouvoir le rejoindre. On aurait bien échangé quelques mots. Nous prenons un pot avec le clarinettiste de Manoeuvre, l'accordéoniste et sa compagne. Moment sympathique où l'on parle de tout et de rien au gré des associations d'idées. Plus tard, Raul Barboza et Nardo Gonzales viennent boire une dernière bière avec des amis. Je leur demande l'autorisation de les photographier. Raul se lève pour nous saluer ; ça amuse Nardo. J'ai l'impression qu'ils ont des capacités de sympathie inépuisables.


vendredi 26, 21h30. Le Bijou. Dernier concert de Raul Barboza et Nardo Gonzales. Un surcroît d'émotion. Comme un bonheur ne vient jamais seul, nous avons emmené Charlotte avec nous. Nous arrivons une heure en avance. "Tu veux un jus de fruits, Chacha ?". "Oui, un jus d'ananas". Les yeux dee Charlotte, dix ans le 5 avril, brillent et elle attend sans impatience le moment d'entrer dans la salle. Quand la porte s'ouvre, le contrôleur lui dit :"Tu es la première, profites-en ! Va choisir ta place, je ferai entrer les gens après". Impressionnant. Elle s'installe au premier rang, un peu à droite, pour bien voir l'accordéon.
Pendant l'attente, nous avons eu le plaisir de retrouver Jean-Marc Licavoli et son copain Pierre, venus avec deux amies. Le temps passe vite. On échange quelques mots aussi avec Jean-Luc Amestoy. Charlotte n'en perd pas une miette.
22:09. Charlotte a bien choisi les places. La présence de Barboza à moins de deux mètres de nous est impressionnante. Entre chaque morceau, il enlève la serviette rouge posée sur sa jambe gauche et il en couvre son accordéon. Il se lève, il salue, il se rassoit, pose sa serviette sur sa jambe, puis reprend son instrument. Il dit alors quelques mots pour situer le morceau qu'il va interpréter. Il cherche les mots justes. Je suis très sensible à ce rituel.
A un certain moment, pour présenter un morceau inspiré par des chutes monumentales du pays guarani, il parle d'imiter leur bruit fantastique, mais il se reprend :"Il ne s'agit pas vraiment d'imiter, il s'agit de les représenter, d'en donner une représentation". Cette précision, ce souci du terme juste, cette attention aux autres, tout cela me touche beaucoup. D'une certaine façon, la musique de Barboza est l'expression d'une vraie philosophie, d'une manière de concevoir et de vivre le rapport au monde naturel et aux autres. Le tout imprégné d'humour.
Ce soir, j'ai beaucoup aimé les interprétations de "La foule", de "Tren expreso", de "Barrio latino" et in fine d'"Adios Nonino".



22:39. Cette photographie me plait bien parce qu'elle a quelque chose, dans la composition et dans les couleurs, de minimaliste. Comme un dessin.


23:07. Celle-ci me plait parce qu'elle me dit que Barboza fait corps avec son accordéon. On dirait qu'il l'écoute lui chuchoter à l'oreille quelque thème et ses variations.



A la fin du concert, "Tu veux prendre un dernier pot, Chacha ?". Oui, évidemment. On s'installe sur les banquettes : Françoise, Charlotte, Jean-Marc, Pierre, leurs deux amies et moi-même. Je suis ému de voir Charlotte attentive à tout ce qui se passe et participant à nos conversations. Comme je vais prendre nos consommations au comptoir, je me rends compte alors que Raul et Nardo sont à côté de moi. Du coup, je leur demande de bien vouloir me signer le billet de Charlotte. Chacun écrit un mot gentil. C'est alors que Raul me dit :"Je voudrais faire un petit cadeau à Charlotte". Il ouvre une boite en carton où il a quelques exemplaires d'"Invierno en Paris". Il m'en donne un :"Pour Charlotte". Je lui dis :"Elle va rougir jusqu'aux oreilles". Il me dit :"Donnez-lui quand nous serons partis". Quelle délicatesse ! Mais je fais signe à Charlotte et elle ne se fait pas prier pour venir faire de grosses bises à Raul et à Nardo.
Plus tard, en sortant du Bijou, je demande à Chacha si c'était bien. Elle me dit :"C'était trop super !".
Le lendemain, samedi, à 21 heures, Somi de Granadas au Conservatoire occitan, rue du pont de tounis. On arrive devant la porte à 20h15. Une personne de l'organisation nous aperçoit et nous propose d'entrer pour nous réchauffer un peu. J'en profite pour acheter un disque de Brotto et Lopez intitulé simplement "Duo"(Production : Presents, org&com ; Distribution : l'Autre Distribution ; 2006) . On retrouve Jean-Marc, l'une de ses amies, accordéoniste, rencontrée hier et son mari. Et toujours ces conversations à bâtons rompus qui font que le temps d'attente passe comme un instant.

Somi de Granadas joue aujourd'hui en trio : Guillaume Lopez, chant, flûtes, saxophones, cornemuse ; Thierry Roques, accordéon ; Pierre Dayraud, batterie, percussions. Ils ont la même présence chaleureuse que Barboza. Leur inspiration vient du plus profond du pays d'Oc avec, comme pour la vigne, des racines profondes qui vont chercher leur sève au sud de l'Espagne et au Maghreb. On peut dire que leur territoire se situe à l'intersection de l'Occitanie, de la Catalogne, de l'Andalousie et du Maghreb. La voix de Guillaume Lopez me touche, car elle a quelque chose de métallique et de soyeux à la fois. Et elle semble remonter à des temps très anciens. Mais elle est moderne aussi. J'ai bien aimé la présence de Pierre Dayraud. pas de fioritures, rien de trop. Juste ! Et que dire de Thierry Roques ? Je l'avais écouté à Buzet sur Tarn. Je l'avais apprécié. Mais ici je l'ai admiré. Qu'il s'agisse d'une bourrée à la façon d'une tarentelle assez troublante comme une incitation à la transe ou de "Los Martinets", il sait tout jouer et le fait bien. Parfois, on explore le musette, parfois on est en terre de jazz, mais c'est toujours du Thierry Roques. Un vrai style, immédiatement identifiable.

samedi 27, 21:34. Roques et Dayraud, accompagnateurs. Lopez chante. On croise des accents flamencos.



21:39. J'aime bien ce profil de Thierry Roques. Calme et comme un peu absent ; l'instant d'après il se déchaine.








22:34. Je suis toujours sensible aux photographies qui montrent l'accordéoniste et son instrument comme une sorte d'être unique, leur rencontre comme un moment fusionnel. Je retrouve cette impression dans cette image.





Après le concert, les organisateurs offrent un pot : jus de fruits ou vin blanc. Allons-y pour le blanc. Sec et tonique. On discute avec les uns et les autres. Je finis par demander aux trois musiciens de bien vouloir me signer nos deux billets de concert. Thierry Roques est amusé par ma demande. Je lui explique qu'il m'a déjà signé son disque à Buzet et que je compte mettre nos deux billets signés dans la pochette de l'album. Il me dit alors :"Vous voulez en faire un collector !"
Peu avant minuit, alors que nous discutons encore sur le trottoir, nous nous rendons compte qu'il fait froid et que c'est bientôt l'heure du dernier métro. Il est temps de rentrer chez soi. L'ami de Jean-Marc et son mari partent chercher leur voiture garée sur le cours Dillon, Jean-Marc rejoint le parking des Carmes et nous deux, nous rejoignons le métro à Esquirol.
Dimanche après-midi, retour à Pau. Lundi, à 11 heures, j'ai rendez-vous à la maison Saint Joseph, à Nay, avec un conseiller financier de la banque postale. Mes parents me signent un procuration pour pouvoir gérer leur ccp. Mon père a en effet de plus en plus de difficultés à tenir ses comptes ; ma mère, les doigts pétrifiés par l'arthrose, ne peut plus tracer de signature identifiable. A midi et quart, je suis de retour à Pau. On décide d'aller déjeuner à l'Ombrière.
Mercredi après-midi, avant notre escapade toulousaine - "1, 2, 3... concerts !" -, j'étais à Nay. Lundi, midi, retour de Nay. La boucle est bouclée.







dimanche 28 mars 2010

dimanche 28 mars - richard galliano joue bach : précisions


De retour de Toulouse, où nous avons pu écouter Raul Barboza au Bijou le 25 et le 26, et Somi de Granadas au Centre Occitan de Musiques et de Danses Traditionnelles le 27 - mais je reviendrai sur ces trois concerts dès que possible -, je découvre un commentaire à mon post du 25 : "Galliano joue Bach".

Ce commentaire, qui, pour une raison qui m'échappe, ne s'affiche pas, m'informe que le lien que j'ai donné va disparaitre dans quelques jours et qu'il serait préférable de donner le lien vers le site officiel de Richard Galliano. Ce que je fais volontiers ici.

http://www.richardgalliano.com/


Pour ceux qui ne veulent faire aucun effort, ci-dessous un lien direct vers le nouvel album dédié à Bach.

Pour ceux qui retiennent en priorité les informations visuelles, ci-dessus la photographie de la couverture de l'album, qui déjà me donne envie de l'écouter.


Le dit commentaire qui refuse de s'afficher est signé N. Caloni (Universal Music Classics & Jazz France), que je remercie pour cette information.
ps : dernière nouvelle ! A 23h09 exactement, ce dimanche, le commentaire en question vient de surgir des limbes d'internet et de s'afficher.

mardi 23 mars 2010

jeudi 25 mars - galliano joue bach

Françoise me transmet à l'instant (mardi 23, 14h30 ! Oui, je sais, le temps va de plus en plus vite et à l'instar de certain cow-boy pressé il m'arrive de bloguer plus vite que mon ombre, à moins que ce ne soit l'inverse !), elle me transmet donc à l'instant un message de Maître Chronique, avec qui elle correspond régulièrement. Message qui contient un lien fort intéressant du point de vue informatif et tout à fait réussi du point de vue esthétique :

http://universalclassique.artistes.universalmusic.fr/Galliano/Presse/Bach.html

Je retiens en particulier la sortie confirmée le 12 avril du disque de Galliano consacré à Bach.

lundi 22 mars 2010

mercredi 24 mars - flamenco accordion

Je ne sais quelle impulsion m'a incité à interroger "Google" avec ces deux termes "flamenco" et "accordéon". En tout cas, elle était heureuse. C'est ainsi en effet que j'ai découvert une très belle vidéo : "Tanguillo, magie d'une rencontre entre la voix du flamenco et un accordéon venu d'orient"...

http://flamencomoderno.musicblog.fr/374406/Tanguillo-magie-d-une-rencontre-entre-la-voix-du-flamenco-et-un-accordeon-venu-d-orient/

... et que j'ai redécouvert, toujours en vidéo, la magnifique "Flamenco Valse" de François Castiello.

http://www.youtube.com/watch?v=DOzA3pM1_3Q&feature=related

Du coup, j'ai écouté son tout aussi magnifique album : "Solo II", Soli Solo 2008. Comment avais-je pu l'oublier ?

mardi 23 mars - spécial copinage : "sound of philadelphia" en téléchargement

Le 20 mars, à 9h46, ce message de Jacques Pellarin est arrivé dans ma boite à courriels :

"Bonjour,

J 'ai le plaisir de vous informer que mon dernier album en trio " Sound of Philadelphia " est distribué en digital sur FNAC.COM après I tunes et Amazon en international (...)"

Jacques
http://www.jacquespellarin.fr/


http://telecharger-musique.fnac.com/fm6586613/Jacques-Pellarin-Trio-Sound-of-Philadelphia?PID=81052&Fr=0&To=0&Mu=-13&Nu=1&from=1&Mn=-1&Ra=-31

Qu'on se le dise !

dimanche 21 mars 2010

lundi 22 mars - à propos du spot des estagnots

Mes posts de vendredi, samedi et, en partie, dimanche se réfèrent au spot des Estagnots. Je l'ai localisé dans les Landes. Il me semble que cette information est un peu trop sommaire et que je dois donner d'autres précisions pour ceux qui seraient tentés de venir y affronter les vagues, la houle, les baïnes, les déferlantes et autres lames de fond.

La plage des Estagnots fait partie du spot de surf de Capbreton-Hossegor-Seignosse. Un spot de qualité mondiale comme le prouve le fait que plusieurs championnats du monde de surf y ont eu lieu. Ce spot se subdivise lui-même en sous-spots, si j'ose dire. A Capbreton, le VVf, la Santocha, le Préventorium et l'Estacade ; à Hossegor, la plage Sud, la Centrale, la Nord, la Gravière et les Culs-Nus ; à Seignosse, les Estagnots, qui est donc le site le plus septentrional.

Quand on arrive en haut de la dune qui domine l'océan, on voit une sorte de temple : quatre poteaux et un toit couvert de tuiles rouges. C'est un espace sacré d'où les augures viennent observer le ciel et l'eau pour faire leurs prédictions, leurs vaticinations et leurs prophéties. Ils n'ont pas leurs pareils pour interpréter les vols des oiseaux et les variations des couleurs des vagues. Leur ciel leur appartient et l'eau est leur royaume.
Si l'on a le regard prosaïque, on note la présence de deux robinets qui servent aux prêtres pour leurs ablutions ou plus simplement pour se doucher. Plus prosaïquement encore on peut déchiffrer sur le frontispice de ce lieu sacré - "Que nul n'entre ici s'il n'est surfeur ! - un message sybillin, dont je respecte l'orthographe : "Touristes, chi dur, chi mou, mais chi dans le trou !". A bon entendeur salut, foi d'aruspices.


Et puis, en faisant le tour du lieu de culte, un autre message moins codé et donc plus explicite pour le vulgum pecus : "Les meilleures vagues sont ICI !".


Quand on s'engage vers la plage en descendant la dune, il faut zigzaguer un peu suivant le parcours tracé par des toiles vertes. C'est une sorte de parcours initiatique sous le regard tutélaire d'un totem bienveillant.



A toute heure du jour et sans doute de la nuit, mais je ne l'ai pas vérifié, il y a des fidèles ou des officiants - pour le culte du surf, les fonctions se confondent - qui viennent faire leurs prières quotidiennes et accomplir leurs dévotions aux lames. Ils sont vêtus de noir. Ils n'entrent jamais dans l'eau sans un long temps préalable de méditation. Ils prient pour que l'océan leur donne chaque jour de bonnes vagues. On voit ci-dessous, à côté du surfeur, une sorte de planche posée au sol. C'est son autel. Au bout d'un certain temps d'immobilité, il va tout à coup se jeter à l'eau en poussant son autel devant lui. Autel que le profane, je le répète, assimile à une simple planche. C'est sur cet autel qu'il reviendra plus tard, debout et en équilibre, sur la crête d'une vague.




Parfois, ces êtres mi-terrestres mi-marins célébrent leur culte en petits groupes. Du moins l'hiver, car l'été il faut les compter par centaines.


En les observant, je me dis que l'océan fonctionne ici comme la musique. Ses mouvements donnent un tempo qui finit par devenir vital et structurant. Vital, car ce tempo, à n'en pas douter, s'impose à la respiration et même au rythme du coeur de chaque surfeur. Structurant, car ce tempo joue le rôle d'une unité de mesure qui en se répétant transforme le flux de la durée en temps organisé.
Qu'il s'agisse de l'océan ou de l'accordéon, dans les deux cas, il est question de lames et de rythmes, donc de tempo.






samedi 20 mars 2010

dimanche 21 mars - textures, entrelacs et autres lacis

Jeudi après-midi. Quelques minutes après 15 heures. La marée montante a déposé sur le sable quantité de fragments de bois et de morceaux de plastique identifiables à leur couleur artificielle. Je ne sais comment les engins qui sillonnent les plages dès l'aube ont laissé sur place ces traces aléatoires. Elles forment une sorte de dentelle sombre ; leur présence indique la limite extrême de la marée haute. Elles semblent narguer la géomètrie des parallèles que les engins ont inscrites dans le sable avec leurs roues énormes. Curieusement, elles sont comme le témoignage d'une vie en miettes. Le bois est usé, déchiqueté, poli par le frottement abrasif du sable et des galets. Les morceaux de plastique, souvent des bouchons, attirent immédiatement l'attention : leur présence est incongrue. Lorsqu'on regarde ces étranges textures, on croirait voir un espace délimité par des paléontologues en attendant d'en dénombrer, classer et interprèter les fossiles qui s'y trouvent, comme autant de messages à décrypter. Je pense aussi à des peintures de Jean-Paul Riopelle ou de Jackson Pollock.




Samedi. Le temps est maussade ; le ciel plombé. Ni ombres, ni relief. Peu après onze heures et demie, une éclaircie. Le prunier explose immaculé. Bien sûr, ça ne va pas durer. Deux jours peut-être, tout au plus. Il faut donc en prendre plein les yeux. Goulûment. On sent que la vie n'y tient plus. Au moindre coup de vent, une pluie de pétales va s'envoler et recouvrir le sol d'une fine couche de neige. Un entrelacs de branches comme un tissu de signes cabalistiques.










Je note, en retrouvant des photographies que j'avais prises l'an dernier au même moment de jubilation vitale, la date : 23 février 2009. Aujourd'hui, nous sommes le 20 mars, jour du printemps. Un mois de retard. A moins que la floraison de l'an dernier n'ait eu lieu avec un mois d'avance si l'on considère que l'explosion de notre prunier coïncide bien avec le printemps.
Je ne saurais dire pourquoi, mais ces deux séries d'images évoquent pour moi les formes de quelque calligraphie arabe et les arabesques dessinées sur le stuc de palais orientaux. Du coup, j'ai envie d'écouter d'abord "Hradcany", puis ensuite "Hradcany".
Je m'explique.
- "Hradcany", enregistré à Paris en octobre 2002. Serge Adam, trompette ; Philippe Botta, saxophone, flûte ; David Venitucci, accordéon.
- "Hradcany, Balkanic Jazz", enregistré en janvier 2006. Les mêmes et Bijan Chemirani, zarb, daf, tambourin.





























samedi 20 mars - si le spot des estagnots m'était contet (2)

Nous sommes revenus d'Hossegor hier soir. Ce matin, en écoutant "Iceberg" pour la énième fois, tout en regardant des photographies que j'ai prises depuis la plage des Estagnots / en regardant des photographies que j'ai prises depuis la plage des Estagnots, tout en écoutant "Iceberg" pour la énième fois, je prends conscience que la correspondance entre cette musique et ces images est encore plus forte que je ne le pensais. Il y a bien dans les deux, ce mixte de mouvement et d'immobilité, ce paradoxe de changements évidents bien qu'imperceptibles. Mais, comme je me laisse aller à contempler ces six photographies, prises autour de 15 heures à trente secondes exactement d'intervalle, mon attention est comme aimantée par la couleur grise dominante. A la réflexion, je me rends compte que ce sont des variations sur le gris. De même que les morceaux joués par Pascal Contet et Wu Wei se développent et se déploient comme des variations dans une tonalité grise. Et je m'avise que le gris, loin d'être une couleur terne, est comme la matrice de toutes les couleurs. Plus que le blanc, dont on dit qu'il est la couleur obtenue en mélageant la lumière de toutes les couleurs, plus que le noir, dont certains peintres ont pu dire qu'il contenait toutes les couleurs, c'est bien le gris qui résulte du mélange de toutes les autres. Le gris est une couleur métisse. On pourrait la croire uniforme ou monotone si l'on se contente de ne lui donner qu'un regard distrait. Mais pour peu que l'on veuille lui donner toute l'attention qu'elle mérite, on lui découvre d'infinies nuances.















C'est ainsi que l'on peut identifier plus d'une douzaine de gris dans ces images : un gris acier, clair et brillant ; un gris anthracite, sombre et mat ; un gris brun ; un gris fer, froid ; un gris acier ; un gris de lin, doucement violâtre ; un gris de maure, brun foncé ; un gris de Payne, moyen et bleuté ; un gris perle, légèrement verdâtre ; un gris souris, gris moyen et soyeux ; un gris taupe, foncé et brunâtre ; un gris tourdille, un peu jaunâtre ; un gris tourterelle, rosé ; un gris vert, voire des gris verts et, enfin, des gris bleus.
Je me demande si un musicien disposerait d'une palette équivalente pour traduire en mots les impressions et les sensations sonores provoquées par l'écoute d'"Iceberg". En tout cas, la correspondance s'impose à moi comme une évidence.









vendredi 19 mars 2010

vendredi 19 mars - si le spot des estagnots m'était contet

Le temps était menaçant. La pluie était annoncée. Le vent était tombé et la marée était au plus bas. Nous avons décidé, Françoise et moi, d'aller voir la plage des Estagnots, une plage de surfeurs, à Seignosse, au nord d'Hossegor. Il était 10h45 quand j'ai fait cette première photographie. Il était 10h46 quand j'ai pris la suivante.


Puis, 10h47...

10h48...


10h49.


J'ai arrêté là la prise de vues et je suis resté longtemps à regarder le mouvement des vagues. Il y avait quelque chose d'hypnotique dans cette vision. J'ai compris pourquoi les surfeurs qui viennent reconnaître l'allure des vagues, leurs complices, ont toujours l'air d'être ailleurs. Comment redescendre de la dune et rejoindre le monde des gens normaux quand on a vibré au rythme des vagues, indéfiniment recommencées. Identiques entre elles pour l'étranger. Singulières, forcément singulières, pour le surfeur.
Ce qui me fascine dans ces quelques images, c'est qu'elles me rappellent ces quelques minutes où, observant attentivement le ciel, l'eau et le sable, je me rendais compte, à certains moments, que des changements imperceptibles avaient eu lieu, sans jamais pouvoir saisir le passage d'un état à l'autre. Une infinité de changements imperceptibles qui se traduit instantanément par la conscience que quelque chose n'est plus pareil. Mais quoi ?
Plus je restais ainsi à contempler ce mixte de mouvement et d'immobilité, plus je pensais à l'album de Pascal Contet et Wu Wei, "Iceberg".
De retour à la maison, j'ai écouté à deux reprises, sans autre occupation qui aurait pu me distraire, les onze morceaux. L'analogie entre les icebergs et les vagues du spot des Estagnots m'a paru évidente. Et si je devais chercher une correspondance encore plus prégnante entre cette musique et ces images, je choisirais le titre 8 : "Wedge", 4:38. Ce sont les mêmes sensations.
Plus tard, nous avons fait le tour du lac d'Hossegor à la recherche de mimosas en fleurs. Comme des explosions de soufre.




samedi 13 mars 2010

samedi 13 mars - estelle sauvain pièces détachées

Bon, je ne vais pas raconter une fois de plus que je suis allé demander au Parvis si "Melosolex" était arrivé. Et que j'y suis allé en vain. Les meilleurs gags ont des limites. Le comique de répétition aussi. Mais, suivant mon habitude, j'ai profité de ma visite à l'espace culture de l'hypermarché Leclerc, pour parcourir les rayons de disques. C'est ainsi que mon attention a été attirée par l'album d'Estelle Sauvain, "Pièces détachées".

Si je ne connaissais pas cet album à strictement parler, j'en avais une idée assez précise après en avoir écouté divers extraits sur myspace, je crois, et sur accordéon-musicstore où il figure au catalogue. Mon intuition est confirmée par l'écoute des dix-sept titres : il s'agit d'un premier disque, plein de promesses. Par exemple, j'ai bien apprécié la fluidité et la clarté du jeu d'Estelle Sauvain. Ce sont des qualités communes à toutes ses interprétations. En revanche, je trouve l'ensemble assez disparate. On dirait un disque destiné à montrer les différentes facettes de son talent. C'est ainsi que l'on passe d'un morceau intitulé "Skifi" d'A. Puchkarenko à un prélude de Bach puis à un hommage à Astor Piazzolla ; du 3ème mouvement d'"Opale Concerto" de Galliano à "A quatre mains" de Beier. A ce propos, notons que plusieurs morceaux sont interprétés en duo par Estelle et sa soeur Angélique au piano. On finit par plusieurs pièces co-signées par L. Beier et Estelle, auxquels se joignent pour certaines F. Deschamps, J.-M. Torchy ou D. Maurice.

Le disque a été enregistré en septembre 2008 par Ludovic Beier ; produit en 2009 par Ludovic Beier et Sébastien Smits pour City Records. C'est une référence et une garantie de qualité. Et, je le répète, un premier opus plein de possibilités et de promesses. Pour l'instant, et sans que cela soit le moins du monde péjoratif, je le situerais plutôt suivant les titres dans la catégorie "exercice de style", voire "exercices de styles", ou "à la manière de...", voire pastiches. C'est agréable à écouter, c'est varié, ça ne provoque, du moins pour moi, pas de véritable émotion.

mercredi 10 mars 2010

mercredi 10 mars - eisherz

Une fois encore, je suis allé voir si "Melosolex" était enfin arrivé au Parvis. Eh ! Non... Je finis par trouver le délai un peu long. Vérification faite sur l'ordinateur de la boutique, ma commande remonte à la mi-janvier. J'étais prévenu : une petite boite de distribution ; il fallait s'attendre à attendre longtemps. Je finis par me demander si la production n'attend pas des commandes fermes pour enregistrer ses disques. Pas de stock ! On déclenche la production à coup sûr. Cette stratégie pourrait expliquer cette attente de deux mois. Au moins.

Mais, bon, cette situation a aussi des effets positifs. C'est ainsi que pour ne pas me laisser aller à la déception, après chacune de mes vaines demandes, je jette un oeil sur les rayons de disques. Il est rare que je n'y déniche pas quelque exemplaire intéressant. Et justement, en parcourant le présentoir des albums de jazz, une couverture attire mon attention : Un cadre noir, une photographie. Sur le cadre noir, "Deux accords diront / Eisherz" ; sur la photographie, deux jeunes femmes, assises à terre, contre un mur. L'une a deux chaussures noires et regarde, mains jointes, vers le ciel. L'autre, qui regarde le photographe droit dans les yeux, a une basket rouge et une basket orange. Avec des lacets blancs. Elles sont adossées à un mur minimaliste de parpaings. C'est un disque Homerecords.be.

Je ne saurais dire pourquoi, car je ne connais pas "Deux accords diront", mais j'ai l'intuition qu'il y a de l'accordéon dans ce disque. Voyons le verso : Anne Niepold, compositions, arrangements, accordéon diatonique, Aline Pohl, accordéon diatonique, Jo Hermans, trompette, flügelhorn, Frederik Heirman, trombone, euphonium, Wielse Meys, saxophone ténor & baryton, clarinette basse, Michel Seba, batterie, percussions. Ce personnel me plait bien. Un détail m'intrigue : j'ai trouvé ce disque en "jazz", mais il y a sur la couverture un autocollant "Trad". A priori, la double appartenance me surprend.

A bien des égards, ce disque est étrange. Je n'y reconnais pas la couleur "trad" ; je le situe beaucoup plus dans une zone au croisement du jazz et de la musique contemporaine. Ou alors, il faut penser à une sorte de tradition primordiale de musique septentrionale. Peut-être une certaine sensibilité nostalgique ou même mélancolique, une perception du monde en demie teinte. Une expression me vient à l'esprit par analogie avec la peinture : "c'est une musique mate". J'essaie de comprendre ce que signifie ici cet adjectif. Est mat, ce qui n'est ni transparent, ni brillant, ni éclatant. Et c'est bien de cela qu'il s'agit : une musique plutôt sombre comme le sont les sous-bois ou les paysages nordiques quand le ciel est bas et lourd. Une musique qui évoque la vie intérieure de forêts profondes. Le trombone, la trompette et les saxophones contribuent largement à créer un tel climat. Les mélodies sont souvent retenues, comme si l'on s'engageait dans des chemins forestiers sans les parcourir jusqu'au bout. En tout cas, il y a comme du mystère dans cette musique. Quelque chose de caché ; le contraire d'une transparence.

En consultant le site http://www.deuxaccordsdiront.be/ , et en particulier en notant le suffixe "be" je ne peux m'empêcher de penser à d'autres accordéonistes : Laloy ou Florizoone. Mais aussi à Tref, à Tricycle. Ou encore au trombone et à l'euphonium de Massot.

Finalement, une fois encore, j'en viens à souhaiter que "Melosolex" tarde encore un peu à arriver.

[Après une nuit de sommeil] En écoutant une nouvelle fois les douze titres d' "Eisherz", je pense à cette caractéristique fondamentale des systèmes, à savoir que "le tout est plus que la somme des parties". La formule est certes abstraite, mais je la trouve tout à fait pertinente en ce qu'elle permet de distinguer entre un objet constitué comme une juxtaposition ou une simple somme d'éléments mécaniquement associés et un objet dont les éléments forment un réseau ou un organisme quasi biologique. En l'occurrence, au fur et à mesure que j'écoute ces douze titres, je sens des liens se tisser entre eux et, d'une certaine façon, l'écoute de chaque morceau agit en retour sur ma perception de tous les autres. On a affaire à un système et non à une liste. En ce sens, je parlerais volontiers, à propos d'"Eisherz" d'une oeuvre.

lundi 8 mars 2010

mardi 9 mars - destins croisés

Elle a découvert l'accordéon à cinq ans. Son oncle la fascinait en jouant de cet instrument pour animer les repas de famille plusieurs fois par an. Son enfance s'est déroulée dans la quiétude d'un village normand. Pour ses sept ans, ses parents, attentifs à son goût pour l'accordéon, puisent dans leurs économies et lui offrent un Hohner qu'elle a toujours conservé, même si elle ne l'utilise plus. Il faudrait lui donner beaucoup de soins, dit-elle, pour qu'il retrouve sa voix. A la même époque, son oncle, qui a vite perçu ses dons, la présente à un professeur, ancien concertiste, qui lui inculque tous les bons principes techniques et moraux qu'elle respecte aujourd'hui encore scrupuleusement. De la posture aux vertus nécessaires pour faire une carrière honorable d'accordéoniste. A dix ans, elle se produit sur scène. On l'inscrit à des concours. Elle aime immédiatement le contact avec le public, le sentiment d'animer une foule de danseurs et l'excitation des compétitions. Plus tard, elle quitte sa Normandie natale, non sans regrets, pour suivre les cours d'un conservatoire prestigieux. Elle se présente avec un succès certain à des concours régionaux, nationaux puis internationaux. Elle devient professeur dans le conservatoire qui l'a formée. Elle perpétue ainsi les enseignements de ses maîtres. A son tour, elle présente ses élèves à des concours. Elle fait partie de jurys reconnus et respectés. Parallèlement à son activité de professeur, qui est sa passion principale ("transmettre... forcément, transmettre"), elle participe à plusieurs formations à géomètrie variable. Elle ne s'interdit aucune expérience, du solo classique au hard-rock en passant par le jazz en quartet. Elle joue dans des églises pour quelques passionnés et sur les scènes de festivals de renommée internationale, aussi bien au Canada qu'en Pologne ou dans le Nord de la France.

Puis, avec le temps, elle éprouve le besoin de "se poser un peu", suivant son expression. Elle se consacre alors à sa mission de professeurs, soucieuse d'inscrire ses élèves dans une tradition rigoureuse, et en même temps de leur permettre d'exprimer leur personnalité et ainsi de s'épanouir. Elle est passionnée par son rôle de Mentor et ne joue plus de l'accordéon que pour elle-même.

Il a découvert l'accordéon en écoutant son grand-père paternel, chauffeur de taxi d'origine russe, qui, chaque fin de semaine, tirait des larmes à toute la famille et à quelques voisins en interprétant des mélodies pleines d'émotions. En fait, il a le sentiment d'avoir toujours vécu dans un monde où l'accordéon était déjà là, comme une présence naturelle. Dès sa naissance, l'accordéon était là, et ça lui a toujours paru naturel, nécessaire, évident. Il a toujours joué de l'accordéon. Son père, guitariste dans une petite formation de jazz manouche, l'avait accompagné pendant quelques années avant de passer le relais à l'un de ses collègues, lui-même accordéoniste à ses heures. Même s'il a suivi l'enseignement de plusieurs professeurs, il se définit plutôt comme un autodidacte. Il n'a jamais passé aucun concours. Il dit sobrement que ça n'était pas son truc. On n'en saura pas plus. Il a monté plusieurs formations à géomètrie variable. Il dit qu'il fallait bien s'adapter à la demande pour faire bouillir la marmite. Il a toujours vécu, plus ou moins bien, de sa passion en animant des bals et autres thés dansants. Même aux pires périodes où l'accordéon était au creux du creux de la vague. Il a participé à un nombre incalculable de croisières. C'était dur, mais au fond c'était la belle vie. Il en a gardé un album de photographies où il pose à côté d'accordéonistes de renom, du moins dans le monde de la croisière. Il a un autre album, plus confidentiel, dont il consent à montrer trois photographies. Il dit qu'il avait été invité à trois reprises à participer à des émissions dominicales de Pascal Sevran, pour qui il a une grande admiration et reconnaissance.

A l'occasion d'un festival aux Caraïbes, ils se sont rencontrés. Ils n'étaient plus très jeunes. Ils avaient vécu, chacun sa vie. Ce fut un coup de foudre. Il dit qu'ils ont décidé, à leur retour en France, de ne plus se quitter. Ils ont décidé de "se poser" quelque part. Ensemble. Ils n'ont pas eu d'enfants. Ils ont acheté un dancing qui peut accueillir trois cents danseurs et jusqu'à cinq cents consommateurs. Ils invitent des orchestres spécialisés dans l'animation de thés dansants et de repas d'associations. Ils invitent aussi des "jeunes" qu'ils essaient de "lancer", mais ça n'est pas toujours facile. Ils rêvent de créer un festival dédié à l'accordéon dans leur village. Ils ont déjà pris des contacts et imaginé le format : trois jours, six concerts et des stages avec les musiciens invités. Ils ouvrent leur dancing le jeudi après-midi, le vendredi après-midi, le samedi et le dimanche de 15 heures à 20 heures. Ils ouvrent aussi plusieurs jours fériés chaque année.

Les jours où leur dancing est fermé, ils disent qu'ils ont "de quoi s'occuper" avec les contacts, les papiers à remplir et toutes les autres formalités à respecter. Elle consacre aussi du temps à quelques élèves, pour lesquels elle a une attention toute maternelle. Ils disent en souriant qu'ils se partagent le travail : elle enseigne, il "fait l'administration". Parfois même, il passe l'aspirateur. Si l'on insiste un peu, ils disent du bout des lèvres qu'ils jouent pour eux-mêmes, en duo. Et qu'ils sont heureux.

Je serais curieux de savoir combien de clones de ce couple on pourrait rencontrer sur "la planète accordéon".

dimanche 7 mars 2010

lundi 8 mars - à propos de "bach... on accordion richard galliano"

1.- J'ai noté que l'album annoncé de Richard Galliano dédié à Bach est présenté sur le site de son éditeur, Deutsche Grammophon, et qu'il est d'ores et déjà possible de le télécharger (piste par piste ou en totalité) :

http://www2.deutschegrammophon.com/cat/result?&PRODUCT_NR=4803341&SearchString=4803341

2. J'ai noté d'autre part qu'il est possible de pré-commander le cd, par exemple sur Amazon, et que celui-ci sera disponible le 12 avril "Bach... on accordion Richard Galliano".

dimanche 7 mars - accordéon & accordéonistes est arrivé-é-é

"Accordéon & accordéonistes", n° 95, mars 2010. Mensuel, 7 euros. 70 pages.

En couverture, "un couple classique" et j'ajoute "sympathique". Photographie en noir et blanc ; couleurs discrètes, sourires discrets. Etant donné mon goût pour les sourires dents blanches et pour les carrosseries bariolées, façon peinture métallisée, cette image, cette représentation de ce couple d'accordéonistes, Valérie et Frédéric Guérouet, entraine d'emblée mon adhésion.

Passons sur les pages dites d'échos. Toujours intéressantes. On est dans l'anecdote, mais j'imagine que tous ces portraits font plaisir à ceux qui en sont les sujets. Apparaitre dans une revue comme "accordéon & accordéonistes", n'est-ce pas une forme de reconnaissance ? Et puis, bien sûr, les formations du CNIMA, les succès du CNIMA, les enseignants du CNIMA, les élèves du CNIMA, etc... etc...

Un compte-rendu enthousiaste (Françoise Jallot, forcément !) de "Balkanofonik" au Cabaret Sauvage. Haïdouti Orkestar à suivre... Un reportage de Philippe Krümm sur Daniel "Pollux" Pichon et le festival de Termignon. Un vrai passionné. Savoureux. La culture vivante dans la France profonde. Quelle vitalité !

"Tête d'affiche" signée Françoise Jallot et consacrée à Valérie et à Frédéric Guérouet, pages 24-29. "Passion classique" et "Elégant gentleman".

Un "entretien" avec Jean-Jacques Franchin et Joël Favreau à propos de "Salut Brassens". Informatif, vivant. Agréable à lire.

Dans le cahier "Pédagogie", je retiens la 2ème partie de l'article de J. Mornet sur la constitution des accords. Technique et encyclopédique. Et la 2ème partie de l'article de W. Sabatier sur le tango, patrimoine culturel immatériel de l'humanité. Toujours très bien documenté et passionné.

Un "portrait" (F.J. encore...) intitulé "Pigalle" sur François Hadji-Lazaro. Bien fait. On a envie d'écouter le dernier cd de FHL, "Des espoirs". Un titre dont on comprend bien toute l'ambiguité.

D'autres portraits et entretiens... Une mine pour une thèse à faire sur les parcours, trajectoires, rêves et autres des accordéonistes professionnels, semi-professionnels, amateurs presque professionnels et toujours professeurs quelque part. Mais aussi, la page obligatoire sur un dancing : sa localisation, ses jours et heures, ses menus, ses orchestres, ses créateurs et ses clients...

Annonce du "Printemps des bretelles", 13e édition du festival, du 19 au 28 mars à Illkirch-Graffenstaden (67).

Parmi les ouvrages recensés en "chroniques", je m'en tiens au dernier opus de MAM (musique acoustique & machines), "Meddle Times / temps mêlés" et à un album de jazz : "Wil Holshouser Trio + Bernardo Sassetti, Palace Ghost and Drunken Hymns". Sans oublier "Nuits parisiennes" de René Sopa, dont j'avais dit il y a quelques semaines tout le plaisir que j'avais eu et que j'ai encore à l'écouter.

Et puis, sous la rubrique "Musette", plein de disques, que probablement je n'écouterai jamais. Il faut de tout pour faire un monde. Une vérité qui s'applique aussi au monde de l'accordéon.

jeudi 4 mars 2010

vendredi 5 mars - les pommes de ma douche

Pour la énième fois, je suis passé au Parvis pour voir si, enfin, "Melosolex" était arrivé. Eh non ! Mais ça ne devrait pas tarder. Demain, sans doute. Je pense à l'histoire du coiffeur qui avait affiché dans sa vitrine :"Demain on rase gratis", et qui ne l'avait jamais enlevée. Mon grand-père, lui-même coiffeur, me la racontait à chacune de nos rencontres. Il avait la satisfaction d'avoir été le premier à me la faire connaitre et, du moins le croyait-il, le premier à m'en avoir fait comprendre l'astuce. C'est pour cela que je feignais, à chaque nouveau récit, d'en découvrir le ressort caché.

Mais comme "Melosolex" tarde à venir, forcément, pour ne pas revenir bredouille à la maison, je jette un oeil en diagonale sur les cds nouvellement arrivés. Cette fois, c'est le dernier opus du quintet "Les pommes de ma douche" qui essaie de se faire une place de choix dans les bacs.

Depuis 2002, c'est le cinquième album de cette formation dont on imaginera facilement le style, sinon le répertoire, si l'on sait que leur nom est une sorte de déformation de l'expression "pompe manouche". Ils sont donc cinq, toujours les mêmes : David Rivière, accordéon, Pierre Delaveau, guitare rythmique, Laurent Delaveau, contrebasse, Dominique Rouquier, guitare solo, Laurent Zeller, violon.

- 2002, "...Y va tomber des cordes !"
- 2004, "J'ai connu de vous... Monsieur Trenet"
- 2006, "On n'est pas là pour se faire engueuler"
- 2007, "Swing from Paris"
- 2009, "Five Men Swinging"

On peut à bon droit parler d'une oeuvre. On sent une ligne directrice, un projet de longue haleine obstinément visé. Je suis pour ma part très sensible au professionnalisme du quintet et je l'écoute agréablement. Mais je dois bien avouer que l'écoute de ces cinq albums ne provoque en moi aucune émotion. Il en est de même pour toute la musique manouche. La dimension "virtuosité" occulte pour moi tout ce qui pourrait susciter une quelconque réaction affective. C'est curieux, mais c'est ainsi, la musique manouche, je la perçois comme une musique très abstraite, presqu'exclusivement formelle.

Curieusement, le disque qui me touche le plus n'est pas dans cette liste : il s'agit d'un album "Le Chant du Monde" de 2004, édité sous le nom de David Rivière :"From Valse to Swing" avec un cd bonus intitulé "Les valses des pionniers - versions originales".

mercredi 3 mars 2010

jeudi 4 mars - lames latines

Il y a quelque temps, en explorant la catégorie "accordéon" du catalogue de Paris Jazz Corner, j'avais repéré l'album de Frédéric Viale : "Lames latines".

Ma première réaction avait été de mettre ce cd dans mon panier, d'abord parce que je connaissais "Paradise", son premier album, je crois, et que je l'appréciais beaucoup, ensuite parce que le titre me paraissait plein de promesses. Mais, à la réflexion, je me suis dit qu'il serait mieux de commander directement cet album à Frédéric Viale lui-même. Pour deux raisons : parce que je pouvais lui demander ainsi de bien vouloir me signer son opus et parce que je pensais que le délai de réception serait plus long que par Paris Jazz Corner, qui est ultra-rapide, ce qui était une bonne manière de faire durer mon désir.

Quelques jours plus tard donc, le facteur arrive devant la porte au moment où je viens relever le courrier. "Une enveloppe pour vous... C'est un disque". Il a l'habitude. Rituel : l'enveloppe posée sur un tapis. En haut à droite, le bureau expéditeur : Cannes Le Beal, 25 02 10, 18 h. Ce moment fait aussi partie du plaisir de la découverte de "Lames latines".

Du point de vue visuel, c'est un bel objet. Belles couleurs chaudes, graphisme simple mais générateur de rêveries. Un morceau de carte du Brésil, ou plus exactement "Brazil", ce qui n'est pas du tout la même chose quant à la charge imaginaire, et des noms mythiques : Manaus, Belem, Belo Horizonte, Rio de Janeiro, Sao Paulo, etc...

Un livret explicatif, mais plein de pistes ou d'allusions qui excitent l'imagination. J'ai plaisir à le lire avant de faire tourner la galette. D'une part, parce que chaque morceau donne lieu à une petite note qui ouvre l'appétit, d'autre part, parce qu'on découvre les musiciens : F. Viale donc à l'accordéon, D. Santiago, guitare, A. Vasconcellos, contrebasse, basse, M. Martins, flûte, M. Villa Bahia, percussions, batterie. Ce sont les musiciens des morceaux enregistrés à Rio les 21-22-23 octobre 2008, auxquels il faut ajouter pour un morceau Thierry Galliano, guitare. Et puis, il y a aussi, pour deux morceaux enregistrés le 26 novembre 2008 à Paris, J.-M. Ecay, guitare, D. Imbert, contrebasse et A Ceccarelli, batterie.

A l'intérieur de la couverture, quelques mots sympathiques, une signature, une trace personnelle qui m'enchante.


Depuis que j'ai commencé à l'écouter, dès que j'en ai le loisir, je remets ce disque sur le lecteur. Je dirais d'abord que mon premier plaisir est déjà dans le son du Victoria et dans ce que Frédéric Viale lui fait dire. Ensuite, il y a ces deux morceaux, le 1 et le 10, le dernier, qui sont deux hommages à Hermeto Pascoal et à Sivuca. Je ne saurais dire explicitement pourquoi mais je sens bien qu'il s'agit d'une référence intimement vécue à une tradition de la musique brésilienne. En ce sens, on se démarque de toutes ces compositions qui ne retiennent de la musique brésilienne que ces traits de surface. Entre les deux, "Alma Argentina"qui montre bien que ces lames latines ne se cantonnent pas au seul Brésil. Mais aussi "Carora", une valse vénézuellienne que pour ma part j'aime beaucoup, ou "Crazy Waltz". J'y retrouve des échos des valses de ces musiciens que Frédéric Viale revendique comme ses maitres : Murena, Viseur, Baselli, Azzola, etc... Ces deux morceaux ont été enregistrés à Paris avec Ecay, Imbert et Ceccarelli. A la hauteur de l'attente, ce qui n'est pas peu dire. Ou encore "Tango du Sud", dont il dit qu'il n'a rien d'un tango, mais que c'est un morceau à cinq temps avec un léger parfum méditerranéen. On le voit, "lames latines" doit s'entendre au sens large : l'expression d'une civilisation qui traverse mer et océan. On pourrait ajouter "Mélodie maternelle" dédié par Frédéric à sa mère avec une introduction d'une minute vingt à la guitare par Thierry Galliano.
A propos de "Tango du Sud", Frédéric Viale dit que "la mélodie du premier mouvement sonne un peu comme une berceuse". Je ne sais pourquoi, mais l'idée me traverse l'esprit qu'en jouant cette mélodie à un nourrisson, il n'est pas certain de l'endormir, mais il est probable qu'on forme ainsi un futur musicien.
Bref, un album qui n'est pas une surprise, car je connaissais "Paradise", mais plutôt une confirmation avec de surcroît ce sentiment que bien d'autres plaisirs sont à venir.

lundi 1 mars 2010

mercredi 3 mars - accordéon bandonéon

En ouvrant mon courriel lundi matin, j'ai trouvé un message du très bon site animé par Guillaume Hodeau sur l'accordéon et le bandonéon.



- D'abord, une nouvelle triste, même si elle fait partie des informations prévisibles, la mort d'Art Van Damme. A cette occasion, le site propose l'achat d'un cd de cet accordéoniste majeur.



- Ensuite, un quizz permettant de gagner le dernier album de Vincent Peirani. Je dis bien "le" dernier album, car un seul exemplaire est mis en jeu. Muni du cd dont j'ai dit quelques mots en date du 2 mars (comprenne qui pourra : j'écris ces lignes le 1er mars, mais je fais allusion à un post du 2. Quand on dit que le temps s'accélère...) et du myspace de Vincent Peirani, je réponds "tout juste" à la dizaine de questions du quizz. Est-ce que j'ai gagné ? Suspense ! Eh non ! "Quelqu'un a été plus rapide que vous" ou "Vous avez été trop lent", je ne me rappelle plus.

Dommage, car j'ai déjà ce disque, acheté samedi au Parvis, et j'aurais eu grand plaisir à l'offrir à un ami. La prochaine fois, je dégainerai plus vite.

Mais si vous voulez jouer, vous pouvez toujours tester vos connaissances concernant Vincent Peirani et son dernier opus... Pour le plaisir, tout simplement.

http://www.accordeon-bandoneon.com/