jeudi 10 mars 2011

jeudi 10 mars - à propos du balluche et de son musette nouveau

Petit retour réflexif sur le dernier opus du Balluche de la Saugrenue. Je l'ai dit : j'aime beaucoup. Si je me réfère aux deux catégories du jugement esthétique, que j'emprunte à Roland Barthes et que j'ai souvent citées, je dirais qu'en effet mon plaisir peut se lire en termes de conjonction de studium et de punctum. Studium, l'intérêt intellectuel que j'ai immédiatement éprouvé à la lecture de l'article consacré au Balluche par Françoise Jallot, pages 20 à 23 du numéro de mars d'"Accordéon & accordéonistes". Intérêt lié en fait au sentiment d'avoir affaire à un projet très élaboré et très argumenté. Je me suis dit :"C'est vachement intelligent ". Du coup, j'ai eu envie d'en savoir plus (studium) et donc d'en écouter plus que ce que j'avais pu entendre sur myspace. Et là, c'est la dimension punctum, cette musique m'a plu d'emblée. Je me suis dit : "C'est vachement bien". Au point qu'il me tarde de partager ce plaisir au plus vite avec Françoise et qu'immédiatement j'ai associé par exemple "Gallito" aux fêtes de Dax et donc à des moments heureux.

Intérêt intellectuel et émotion, le couple de notions fonctionne bien avec en plus cette sorte de dialectique qui fait qu'en écoutant le disque j'ai envie de revenir à l'article et, réciproquement, que la lecture de l'article me donne envie d'écouter à nouveau tel ou tel morceau.

Mais, je m'avise qu'il y a autre chose dans le plaisir de ce jeu entre studium et punctum. Si j'osais compléter l'analyse de Roland Barthes, et en me plaçant sur le même terrain, je dirais qu'il y a aussi un sentiment particulier que j'appellerais volontiers adaequatio. J'entends par là le sentiment d'un accord entre le projet du groupe - on pourrait dire ses idées, son concept fondateur, ses intentions - et les moyens mis en oeuvre - composition du groupe et composition des morceaux, reprises et adaptations, arrangements -. Un accord juste entre la fin visée et les moyens mobilisés. J'en trouve confirmation dans le premier paragraphe de l'article. A la question de savoir comment s'est fait le choix des instruments présents dans le groupe, la réponse est la suivante :" Il s'est fait dans un souci d'esthétisme musical et de retour à la formation typique de l'orchestre musette. Nous avions envie de faire sonner ce groupe en acoustique. On constatait que, souvent, les groupes de bal musette avaient perdu de leur dynamique, de leur grain d'origine. Qu'ils avaient aplati, lissé le style, avec la guitare, la basse électrique et la batterie moderne". Continuons. A la question :" Quel esprit avez-vous voulu mettre en avant ?", réponse :" Dans un premier temps, on souhaite revaloriser cette musique, longtemps galvaudée par le star system autour des accordéonistes jouant des morceaux où la dimension spectaculaire de la technique passait devant la musicalité et l'émotion [...] Dans un second temps, à côté de cet esprit roots, nous proposons de la modernité. Et de la même manière que le style musette est né de métissages avec différentes musiques d'Europe à Paris, nous continuons cette voie à expérimenter, avec notre culture "actuelle", d'autres voies dans lesquelles avancer".

Arrivé à ce point de ma réflexion, laquelle m'a conduit à ajouter une troisième catégorie, adaequatio, aux deux, studium et punctum  de Barthes, l'idée me vient que ce projet du Balluche n'est pas sans rappeler celui de Richard Galliano et de son new musette, dans un autre registre. A partir du musette historique, on aurait deux voies, deux projets, qui s'en inspirent pour le dépasser et continuer à en faire une musique actuelle et vivante : d'une part le new musette, d'autre part le musette nouveau.           

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